« Ce que je vis [lorsque je suis en état d’improvisation], ça pourrait être un changement de rapport à moi par rapport au quotidien, un changement de rapport au vécu. (…) Le changement, c’est la granularité avec un mode plus quotidien. Ça se traduit souvent par deux façons : il va y avoir une granularité perceptive qui est différente, elle est souvent beaucoup plus ténue ; c’est comme si on se mettait à regarder quelque chose avec une certaine qualité attentionnelle qui fait que ça fait ressortir énormément, énormément, énormément de détails. (…) La deuxième chose, c’est qu’il y a une sorte de prise en compte temporelle qui est complètement différente. Il y a un tissage temporel qui est vraiment différent. En suspendant, en mettant un peu à l’écart les buts ou les projections sur ce qu’il va arriver, c’est comme si on s’arrête un peu, on laisse de l’espace à ce moment-là, et du coup, il y a pleins de possibilité d’épaisseur de vécu qui arrivent et qui vont se tisser avec à la fois ce qui est présent, à la fois avec des choses qui peuvent revenir du passé, avec des gestes qui peuvent revenir du passé, avec des motricités qui vont être là, qui vont être présentes. C’est à la fois prendre en compte une temporalité du futur, et en même temps de la ramener ici. Ça va se déployer dans ce temps-là, dans cet espace-là, (…) toute cette projection, dans ce temps-là ouvert, et tout ce de quoi il va être rempli, qui s’ouvre comme potentiel. C’est un mécanisme pour moi que je reconnais souvent, c’est-à-dire une manière de prendre le temps dans lequel ça va se développer, dans lequel les choses vont s’ouvrir. »